120 - Gabriel MAYER (1818 - 1905) (2) [1] [2]

On 15 February 1870 MAYER filed  an application for a brevet d’importation relating to a: 

Machine à coudre les gants, faisant le point de surjet et le point feston noués

The application was based on a Belgian patent granted on 15 November 1869 and on a corresponding French patent granted on 13 December 1869. In the cover letter accompanying the application, MAYER claims to be the owner of the Belgian patent.

The invention claims the following « perfectionnements » 

  • Dans la disposition d'un organe spécial qui permet de produire un point de surjet dit « point de  feston » ou « noué » afin de le distinguer des autres points de surjet; en supprimant à volonté cet organe, les machines donnent exactement le point de « piqûre » ainsi qu'on l'obtient avec toutes les machines à navette;
  • Dans une dispositions toute particulière d'un ramasseur et tendeur de fil qui fonctionne sans secousse et d'une manière automatique …;
  • Dans la combinaison d'une pince d'alimentation qui fait avancer les pièces à coudre, cette combinaison m'a amené à créer une came de forme toute spéciale qui fait agir un levier relié à la pince …;
  • Dans la combinaison de la navette fonctionnant dans un segment de cercle …;
  • Dans le façonnage du point lui-même dit « point de feston » ou noué et à deux fils

The Chambre de commerce appointed Pierre STAUDT-MEYER, mécanicien constructeur de machines à coudre and Jean François EYDT, architecte to conduct the examination of the application. The experts’ report of 7 March 1870 (drafted by EYDT) [3] was full of praise:

C'est pour la ganterie surtout que le mérite de cette invention se caractérise par un travail d'une régularité parfaite, se faisant avec toute facilité sur tous les contours et produisant une couture résistante, le fil ne se détachant pas, de quelque manière que l'on s'y prenne, ce dont nous nous sommes assurés en faisant mettre en mouvement en la demeure du demandeur une machine pareille à la description présentée; nous avons pu admirer comment ses organes subtiles et de facile mouvement fonctionnent avec une célérité et une admirable précision.

Aussi cette solution heureuse ne manquera pas d'imprimer une activité bien autrement grande à l'industrie gantière de notre pays; elle pourra se développer avec une supériorité marquée dans ses produits mais aussi en assurant un salaire plus élevé à des personnes d'une classe ouvrière à laquelle ce genre de travail manuel peu productif ne convenait pas; sans porter préjudice au travail existant jusqu'à présent dans le pays. 

Il convient en outre à faire ressortir le mérite de cette invention, en ce que la main-d'œuvre faisant souvent défaut en des moments de presse, ce qui surtout a lieu à la campagne pendant la saison de la culture des champs, qu’alors le travail des ouvriers pour les diverses préparations de la matière pour la couture devenaient intermittents et cette stagnation réagissait non seulement sur l'ensemble de la fabrication mais aussi sur la quantité des produits, ce qui pourra être évité par la suite. 

Comme le pays tend à progresser dans différentes branches d'industrie qui demandent le travail manuel et peuvent par là-même, influencer l'extension de certaines autres industries, il est dès lors heureux de pouvoir suppléer au manque de bras par l'aide des machines. 

La spécialité dont nous nous occupons est donc maintenant assurée par l'invention produite; son développement n’est plus gêné, la régularité en la pondération du travail se fera sans chômage forcé; l'ouvrier ne dépendra plus du manque de couture, ce qui contribuera beaucoup à la moralité de cette classe d'ouvriers. 

Nous pensons donc, Monsieur le Président, que non seulement vous appuierez avec nous en son entière teneur la demande de cette utile invention et ses perfectionnement mais que vous serez également d'accord que notre petit pays doit s'applaudir de voir la ganterie nationale se développer en peu de temps, dans l'intérêt de la classe ouvrière et de la fortune publique.

The Chambre de commerce met on 29 March 1870 to review their experts’ opinion; in an unusual step they forwarded to the Government an extract from the minutes of their meeting very promptly, on 30 March 1870:

Les experts ont fait ressortir les avantages de cette machine qu'ils ont vu fonctionner, ainsi que la perfection du point de couture dit « de feston noué à deux fils » dont le sieur Meyer se dit également propriétaire de l'invention.

Un membre de l'assemblée [4] conteste que le sieur Meyer soit l'inventeur ni de la machine ni du point de couture pour lesquel il a demandé un privilège connexe, mais que ces inventions ont été brevetées en France à un nommé Brossert, à Paris; que, par l'octroi de ce brevet, les autres fabricants de gants du pays se trouveraient dans l'obligation de subir les prétentions probablement exagérées du sieur Mayer pour acquérir de semblables métiers, ce qui les mettrait dans une position d'infériorité vis-à-vis de ce dernier, ou bien il seraient forcés à fermer leurs ateliers pour les établir ailleurs; enfin, que le point de couture dit « de feston noué ou de surjet » était connu et que le sieur Mayer ne pouvait être breveté de ce chef.

La Chambre de commerce considérant que le sieur Meyer a acquis les droits de l'invention du système de métier pour lequel il demande à être breveté, il peut les faire valoir comme le ferait l'inventeur même; 

que si des métiers de différents systèmes peuvent produire les mêmes résultats, il est loisible aux autres fabricants de gants de s'en servir; 

que le brevet devient caduc s'il est reconnu que le point de couture dit « de feston noué » était connu et usité avant l'introduction du métier du sieur Meyer, que cette appréciation serait du ressort des tribunaux.

La question mise aux voix par le président de l'assemblée, s’il convenait d'appuyer la demande en question, a été résolue affirmativement par sept voix contre une et une abstention; la question de la durée du brevet de 15 ans a été décidée en faveur du sieur Mayer par quatre voix contre trois et deux abstentions. En conséquence, l'assemblée émet l’avis qu’il y a lieu d'accorder ou sieur Meyer le brevet sollicité et ce pour une durée de 15 ans.

Présents: Mersch-Wittenauer, président; Victor Buck, vice-président; Aloyse Eydt, Auguste Charles, Victor Wahl, L. Berchem, Krewinckel, S. Godchaux & Schmitt, membres. M.M. Lamort et Mongenast se font excuser; Kuborn, sécrétaire.

The patent was granted on 2 April 1870 for a duration of 15 years.

On 11 April 1870 Auguste CHARLES, gantier and MAYER’s main competitor wrote to the Directeur général de la Justice et du Commerce:

Je vous demande bien pardon si je prends la liberté de vous faire quelques observations concernant le brevet que Monsieur Gabriel Mayer de Luxembourg vous a demandé, observations que mon devoir de fabricant me dicte. 

Les brevets en général sont seulement accordés dans le but d'étendre et de perfectionner l'industrie. Je ne crois pas que le brevet d'importation que Monsieur Mayer veut obtenir puisse arriver à cette fin. 

Nous ne sommes que deux fabricants de gants dans le pays, si donc Monsieur Mayer demande un brevet pour la fabrication de machines à coudre les gants, c'est évidemment pour nous exclure des bénéfices de ces machines. S'il s'offre aussi à nous en vendre, mais à quelles conditions et à quel prix? 

Je crois donc que ce brevet est non seulement contre les intérêts de la ganterie en général, s'il est exploité par une seule personne, mais, plus encore, contre ceux du Pays. Quelques milliers d'ouvriers de l’Oesling, de la Moselle etc. gagnent leur subsistance par la couture de gants; par les machines leur nombre serait grandement restreint. Ces désavantages ne peuvent pas être hors d'état de nuire que par le plus grand perfectionnement et étendue de la ganterie en général.

Si nous passons aussi et ne ferons pas d'opposition au brevet sur la fabrication des machines, Monsieur Gabriel Mayer demande cependant plus, il veut obtenir encore la propriété de ce système pour coudre les gants, ainsi il exige non seulement le brevet pour les machines, mais encore un brevet pour s'en servir exclusivement, et fabriquer seul la marchandise par ces machines, une demande qui me paraît tout à fait illégale et en contradiction avec le but des brevets.. 

Si on voulait introduire un pareil système de brevets, cela serait chasser l'industrie hors du pays au profit de quelques personnes.

J’espère, Monsieur, que vous appréciez l'équité de mes observations et que vous leur ferez justice.

On 16 May 1870 the Ministre d’Etat, Président du Gouvernement replied to CHARLES:

J'ai l'honneur de vous informer que votre réclamation en date du 11 avril dernier contre la demande en obtention d'un brevet d'invention et d’importation présentée par le sieur G. Mayer, fabricant de gants à Luxembourg, n'a pu recevoir de suite, la proposition d'accorder le brevet dont il s'agit ayant déjà été soumise le 2 du même mois à la sanction suprême.

_____________________________________

[1] FamilySearch database

[2] see also No 118 for biography

[3] EYDT was in the process of drawing the architectural plans for MAYER’s villa in the rue de l’Arsenal

[4] presumably Auguste CHARLES, judging from his written intervention of 11 April 1870; in this context it is interesting to reflect on a controversy of 1869 involving CHARLES and MAYER: the Chambre de commerce had proposed MAYER as its first choice for joining their collège as new conseiller but CHARLES, their second choice, was appointed by the Government (L’Union, 16 March 1869, page 1).

(15/02/2021)